Que célébrons-nous le 8 mai ?

En ce 8 mai, nous célébrons tout d’abord la capitulation de l’Allemagne nazie, la victoire des alliés et surtout la fin de la guerre en Europe. Obtenue le 7 mai 1945 à Redon, la fin des combats fut décidée à 23 h 01 le 8 mai 1945. Elle sera effective côté russe le 9 mai à 1 h 01 compte tenu du décalage horaire.

Le 8 mai, c’est aussi la naissance d’une nouvelle société, celle de l’état-providence avec la mise en place d’avancées sociales sans précédent. Créé en mai 1943, le CNR va réunir toutes les forces politiques et syndicales autour de Charles de Gaulle. Les assurances, les banques, les entreprises collaborationnistes furent nationalisées dès 1945, période où fut institué le régime général de la sécurité sociale. Les femmes purent enfin voter, après que le suffrage universel fut rétabli dès 1944. Quant à EDF, l’entreprise vit le jour en 1946. La liste est longue de tous ces marqueurs qui ont construit la société française.

Cette reconstruction de la France s’est inscrite avant tout dans une logique d’intérêt général. Les élites politiques, syndicales, économiques et financières se sont mises au service des classes moyennes et populaires. Croyant en 1940 à la victoire totale de l’Allemagne nazie, elles avaient fait majoritairement le choix de se mettre au service du plus fort. A l’occasion de l’écriture de son livre « Ritournelles pour la fin« , Jean-Marie-Gustave Le Clézio évoquait ce goût singulier des êtres humains pour les hommes forts, et au travers d’eux pour leurs propres petits intérêts.

La guerre, les guerres ne se sont pas arrêtées pour autant après le 8 mai 1945. Il faudra attendre le 14 août, après l’envoi de deux bombes nucléaires par les Américains sur les populations civiles d’Hiroshima et de Nagasaki, pour que le Japon capitule à son tour. Un mouvement de décolonisation profond attisé par la rivalité entre soviétiques et américains aura entraîné des guerres de libération meurtrières, comme celles d’Indochine et d’Algérie, qui furent le cimetière de nombreux soldats français. Les 60 millions de victimes civiles et militaires de la 2e guerre mondiale, dont 26 millions de Soviétiques russes, biélorusses et ukrainiens notamment, n’auront pas suffi à nous faire comprendre l’abjection et l’idiotie de la guerre.

Après la guerre des Balkans de 1991 à 1995 qui a entraîné la dislocation de la Yougoslavie, la guerre du Kosovo de 1998 à 1999, les canons tonnent une nouvelle fois aux portes de l’Union Européenne. Ces guerres d’aujourd’hui sont en grande partie des produits d’une histoire qui n’aura pas permis de résoudre la question des limites territoriales. Comme le disait très justement Régis Debray, nos sociétés ont besoin de repères. Elles ont besoin de frontières.

Comme nous l’ont montré les combattants héroïques de la 2e guerre mondiale, militaires et résistants, la défense de nos valeurs peut nous contraindre à nous battre si nous y sommes aculés. Une société ne peut vivre en paix qu’à la condition que son équilibre social soit respecté, qu’à la condition que les riches ne deviennent pas toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres, faute de quoi elle cherchera à résoudre ses conflits internes en désignant des boucs émissaires. Souvenons-nous que l’effondrement de la République de Weimar et la grande crise économique de 1929 virent Hitler arriver au pouvoir en 1933 et lancer la solution finale en 1942.

Alors, aujourd’hui en ce 8 mai 2023, tâchons de repenser à tous ces hommes, à toutes ces femmes qui se seront battus au péril de leur vie pour construire ce modèle de société dans lequel nous avons la chance de vivre aujourd’hui. Sans solidarité, sans fraternité, les sociétés humaines sont condamnées à la barbarie et à la guerre.

Denis Szalkowski
Maire de Saint-Eloi-de-Fourques

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