Saint-Eloi-de-Fourques, le 5 avril 2019
Monsieur le Député, cher Bruno,
Comme nous nous connaissons depuis longtemps maintenant, je pense que tu ne verras aucun problème à ce que j’opte dans ce courrier pour le tutoiement.
Dans ta réponse en date du 3 avril 2019, tu évoques mes erreurs et approximations d’interprétation, mes affabulations, voire même des arrière-pensées, alors que j’ai la curieuse sensation que votre politique éducative fait la part belle à l’arrière-monde, aux arrière-boutiques et aux intérêts privés.
Soyons factuels et reprenons, ensemble, la lecture de l’article L.421-19-17 du projet de loi « Pour une école de la confiance » qui institue la création de ces établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux, c’est-à-dire la fusion des CM1 et CM2 avec les classes du 1er cycle du 2nd degré. Je n’évoque même pas ici le fait que des gamins de 9 ans puissent se trouver noyer au milieu d’établissements à plusieurs centaines d’élèves où sévissent le racket, des rapports de domination et des violences des plus vieux envers les plus petits. Donc…
« Après avis de l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation [NDLR : pas précisé… Ministère, DASEN, Inspecteur Académique], ces établissements seront créés par arrêté du représentant de l’État dans le département [NDLR : le Préfet, a priori] sur proposition conjointe des collectivités territoriales ou EPCI de rattachement du collège [NDLR : département] et des écoles concernées [NDLR : directeur ? Inspecteur Académique ?], après conclusion d’une convention entre ces collectivités« .
La langue française, l’absence de ponctuation peuvent générer, comme tu le sais, de grandes ambiguïtés, des approximations et des erreurs d’interprétation fort dommageables. C’est pourquoi le mieux est encore de les lever en explicitant davantage. Je te – vous – propose, concernant l’article L.421-19-17 la formulation suivante :
« Après avis de l’Inspection Académique, ces établissements seront créés par arrêté du Préfet sur proposition conjointe des collectivités territoriales ou EPCI de rattachement du collège et des communes des écoles concernées, après conclusion d’une convention entre ces collectivités exigeant l’accord de toutes les parties« .
En l’état, compte tenu de l’ambiguïté de la formulation, je pense très sincèrement que votre projet est de permettre la disparition des écoles en milieu rural, conformément aux velléités invariantes d’une technostructure d’État depuis la loi Chevènement de 1998. Je tiens à préciser que je ne suis pas un adepte de la théorie du complot. Juste un élu local de Saint-Eloi-de-Fourques depuis 2001 qui s’est battu avec l’ancien Maire, Alain Huché, pour préserver nos écoles sur notre territoire ! Or, si les CM1/CM2 s’en vont de nos campagnes, de nos communes, je ne vois pas comment, par la suite, nous pourrions retenir un mouvement de regroupement pour les maternelles, les CP/CE1/CE2.
Quand je vois la complication à mobiliser les moyens dans nos écoles dites « inclusives » pour l’encadrement d’enfants difficiles de plus en plus nombreux, oui, je pense sincèrement que votre projet est de pousser les parents à mettre leurs enfants dans le privé ! C’est d’ailleurs ce que j’ai fait pour ma fille Emma, afin de lui éviter les violences et les brutalités dont sont victimes nos enfants dans les classes de notre regroupement.
Je te prie de croire, Monsieur le Député, mon cher Bruno, en l’assurance de toute ma considération.
Denis Szalkowski, Maire de Saint-Eloi-de-Fourques